Invitée à s’exprimer devant près de 350 délégués FO, la direction de Carrefour a défendu sa stratégie dans un contexte économique marqué par l’inflation et la pression sur le modèle économique.
La concurrence est rude dans la grande distribution, vous avez vu les annonces d’Auchan qui prévoit de fermer des magasins. Nous avons repris des magasins Casino et les magasins Cora.
Sur la performance, nous avons un score historique de 36 en NPS à fin novembre, soit + 4,6 points, c'est un signe très fort. Sur le commerce, nous améliorons la disponibilité des produits (+ 22 points), l'attente en caisse et la fraicheur des produits. Ce sont des indicateurs très satisfaisants, nous allons dans le bon sens et nous devons continuer.
Nous avons voulu remettre les basiques au centre de nos préoccupations : le plein, le prix, le propre. Vous avez remarqué que nous avons concentré nos efforts sur la reprise en main des basiques et de trouver un équilibre entre la fidélité, la promo et nos prix. Nous avons réajusté nos prix. En 2025, nous allons continuer sur les basiques.
Nous voulons nous différencier sur les produits frais et notamment sur les fruits & légumes. Nous devons professionnaliser nos salariés par des formations sur les métiers du PFT. Nous serons très vigilants sur la qualité de nos produits.
Nous avons travaillé sur l'assortiment dans le cadre du modèle Maxi pour avoir le juste choix. Nous avons développé le prêt à vendre pour gagner en productivité en travaillant auprès des fournisseurs. Les magasins qui déploient le modèle Maxi augmentent leur chiffre d'affaires plus que les autres magasins donc en 2025 le déploiement va se poursuivre. Sur la réduction des coûts, nous avons travaillé sur la démarque, sur la sobriété énergétique, sur la rationalisation de l’offre (Maxi).
Pour FO Carrefour Hypers, la direction ne présente aucune stratégie commerciale claire et ni de modèle organisationnel viable.
Des rumeurs circulent dans la presse spécialisée sur l’avenir du groupe, nous sommes inquiets de votre absence de réponse. Nous avons demandé un entretien avec Alexandre Bompard, PDG du groupe.
Nous pourrions avancer beaucoup plus vite sur le sujet des classifications, cela fait dix ans que nous discutons ! Nous aurons une revendication sur le niveau des salariés des Pôles Services lors des négociations. Certains métiers ne sont pas classifiés, comme la location de véhicules, c’est un métier à part entière.
Nous avons de plus en plus de mal à comprendre la vision stratégique de l'entreprise. Les changements organisationnels s'enchaînent sans ligne directrice claire, ce qui ajoute à la confusion. La seule constante semble être une politique systématique de réduction des coûts. Mais qu'en est-il de la stratégie pour relancer durablement le chiffre d'affaires ? Les salariés sont profondément préoccupés par leur avenir.
Le programme TOP, présenté comme une solution "merveilleuse", a été abandonné en moins de deux ans. Que devons-nous en penser ? Ces revirements successifs sapent la confiance des équipes et fragilisent l'organisation.
Les élus des magasins ont pu interpeller directement la direction des Hypers sur la réalité des conditions de travail et les problèmes rencontrés par les salariés.
Intervention de Yannick, magasin de Nevers.
Le non alimentaire est le parent pauvre de Carrefour. Il n'y a pas d'investissement, nous sommes parfois relégués au fond du magasin. Qu'allez-vous faire pour le non alimentaire ?
Réponse de la direction :
Un axe de notre feuille de route est dédié au non alimentaire, il était totalement délaissé mais cela revient sur le haut de la pile. Si nous mettons le non-alimentaire en avant c'est forcément au détriment d'un autre secteur donc il faut bien faire son choix. Nous allons déployer le concept testé à Rambouillet dans une quarantaine de magasins et ensuite il y a le sujet EPCS. Nous avons encore des clients, une offre de financement, etc.
Intervention de Raouf, magasin de Meylan.
Quand allez-vous arrêter l'hémorragie de la location-gérance et le fléau moral pour les salariés ? Vous organisez la détresse des salariés. On ne vous demande pas des discours et des réflexions, on n'a plus le temps. On n'a pas de matériel pour travailler !
Réponse de la direction :
Nous assumons nos responsabilités, c'est normal que vous attendiez des réponses. Nous ne sommes pas d'accord sur un certain nombre de sujets, notamment la location- gérance. La décision de l'entreprise est de continuer dans cette voie. L'idée n'est pas de passer tous les magasins mais d'avoir ces deux modes d'exploitation.
Intervention de Sylvette, magasin de Liévin.
Nous constatons la baisse des effectifs depuis 3 ans, nous avons beaucoup de départs. Les salariés sont en souffrance, les objectifs sont inatteignables. Que comptez-vous faire pour protéger les salariés ?
Réponse de la direction :
Le niveau de turnover est semblable à l'année dernière. La baisse de l'effectif est en lien avec la baisse des volumes, dans les mêmes proportions mais il faut regarder ensuite magasin par magasin. Nous devons mettre les bonnes heures au bon endroit.
Intervention de Fousya, magasin de Ollioules.
Je m’appelle Fousya, je suis hôtesse d’accueil. Nos conditions de travail sont difficiles et notre métier évolue en permanence. Nous avons besoin d’une reconnaissance dans la classification de notre niveau et par conséquent de notre salaire, à la hauteur de nos très nombreuses tâches.
Pour FO Carrefour Hypers, la direction doit faire le choix du dialogue social et de la négociation, quand il ne s’agit pas de faire appliquer les accords déjà existants.
En 2011, la direction avait déjà tenté d’instaurer un modèle organisationnel similaire au projet TOP. Face à notre opposition ferme, elle avait fini par renoncer à ce projet. Aujourd’hui, le projet TOP incarne une véritable transformation culturelle et structurelle, avec pour objectifs principaux l’augmentation de la productivité et le développement de la polyvalence.
Cependant, après deux années d’application, la direction a constaté qu’il existait autant de versions du projet TOP que de magasins. Quand on voit les premiers déploiements d’Optimax dans les magasins, on se dit que ça ne va rien changer à la situation des magasins. Sur le papier, c'est une chose, mais sur le terrain ça ne sera jamais mis en place, les magasins vont continuer dans le projet TOP qu'ils ont déjà adapté. Nous affirmons que la réussite des projets repose sur la mise en place de moyens humains suffisants et d’un management adapté.
Le Drive doit bénéficier des ressources humaines nécessaires pour garantir des conditions de travail dignes et permettre l’atteinte des objectifs de l’entreprise. Actuellement, le Drive n’est pas clairement reconnu au sein de l’entreprise, et ses salariés sont assimilés à de simples assistants de vente. Il est indispensable de s’interroger sur la structure et l’organisation des équipes du Drive afin d’y remédier efficacement.
Des accords ont été signés mais ils ont trop souvent du mal à franchir les portes des magasins. Nous sommes face à un dialogue social de qualité au niveau national, mais son application concrète fait cruellement défaut sur le terrain. Il est de votre responsabilité de veiller à leur mise en œuvre effective dans les magasins.
Frédéric Souillot, secrétaire général de la Confédération Force Ouvrière prend la parole devant les délégués.
Nous voyons ce qui se passe chez Auchan, chez Casino... ceux qui morflent, ce sont les salariés, des familles complètes ! Avec votre fédération, nous avons adressé un courrier au Premier Ministre pour mettre en place un comité de filière pour passer ces crises. Un décret sera publié cette semaine et nous serons intégré au Collège national du commerce. Nous écrirons à Alexandre Bompard pour lui demander l'arrêt des passages en location-gérance, ils vont devoir réfléchir à la filière commerce alimentaire et non-alimentaire.
Le cycle électoral entamé en septembre 2022 dans les magasins est arrivé à son terme. Dominique Moualek livre les résultats définitifs de ce vote.
À l’échelle de Carrefour Hypermarchés, en intégrant l’entité DEFH (siège), les salariés ont valablement exprimé 25 049 suffrages. FO en recueille 12 407, soit 49,53 % des voix et elle reste ainsi la première organisation syndicale représentative.
Ces résultats, qui sont supérieurs à ceux du cycle précédent, confirment la position de FO comme première organisation syndicale dans les hypermarchés. Ces résultats sont la reconnaissance des salariés du travail réalisé, par tous les élus, tous les jours sur le terrain.